Insolite/Politiquement incorrect/Sportif

Foot, sifflets et politique

Vino Tinto football Venezuela

Mardi dernier 26 mars, la Vino Tinto, l’équipe nationale de football du Venezuela, rencontrait à Puerto Ordaz la Colombie. Elle l’a remporté 1-0, ce qui lui laisse toutes ses chances de se qualifier –pour la première fois– pour le Mundial de 2014 au Brésil.

Cela, c’est l’histoire officielle, racontée sur tous les sites de foot de ce monde. Ce qu’on sait moins, du moins en dehors du Venezuela, c’est qu’avant le début de la rencontre, la Confédération sud-américaine de football (Conmebol) avait autorisé la tenue d’une minute de silence à la mémoire de Hugo Chávez, décédé il y a trois semaines. Et là, surprise (relative) : de silence il n’y eut point, puisqu’une bonne partie du public s’est mise à siffler et huer à qui mieux mieux. Voyez ces images de la télévision colombienne et écoutez :

Du côté de la télévision vénézuélienne, c’est plutôt la gêne. La solution trouvée a été de baisser le son et de se priver de tout commentaire ! Oups !

L’épisode illustre bien dans quelle paranoïa nous vivons au quotidien : plus rien en ce pays n’échappe à la politique (ou plutôt la politicaillerie), pas même le football, pas même en pleine Semana Santa.

Manque de jugement

Disons-le tout net : ceux qui ont suggéré cette minute de silence (et là, suivez mon regard, ce ne peut être qu’un représentant du gouvernement, via la Fédération vénézuélienne de football) ont fait preuve d’un manque de jugement élémentaire. Car c’était bel et bien se jeter dans la gueule du loup que de demander une minute de silence dans de telles circonstances.

En effet, c’était oublier qu’on se trouve dans un pays viscéralement divisé, dont 44 % des électeurs ont voté pour l’opposition il y a à peine 6 mois. C’était oublier qu’une nouvelle échéance électorale décisive se profile dans moins de trois semaines. C’était oublier aussi que le prix des entrées aux matches internationaux est tellement élevé que les couches populaires n’y ont tout simplement pas accès. C’était oublier enfin que, historiquement, le football n’est pas au Venezuela le sport du peuple (c’est le base-ball), mais celui des classes moyennes et des immigrants italiens, espagnols et portugais, plutôt bien placés dans l’échelle sociale. Car le football est ici le sport par excellence des collèges catholiques privés, fréquentés par certaine classe sociale, selon une tradition qui remonte jusqu’aux salésiens d’Italie du Nord à la fin du 19e siècle.

Conséquence : à Puerto Ordaz, on s’est retrouvé dans un stade rempli de 70 % d’opposants gonflés à bloc, qui plus est en pleine période électorale ! Qu’attendre d’eux si ce ne sont huées et quolibets ? C’est à se demander si ce n’est pas l’opposition qui a commandité sous le manteau cette minute de sifflets !

2 réflexions sur “Foot, sifflets et politique

  1. Décidément certains vivent sur un nuage … Honorer Chavez dans un stade rempli d’opposants – donc le football n’est pas populaire au Venezuela … pas plus qu’aux USA donc . Le base ball est aussi une passion cubaine me semble-t-il et en tout cas Cuba y excelle .
    En France , on en est à menacer ceux qui ne chantent pas bien la Marseillaise ( devenue obligatoire dans l’enseignement élémentaire – en principe , car qui en connaît les couplets ?) notamment dans les stades .
    mais pourquoi chanter l’hymne national lors d’un match ?
    A croire que ces matches sont donc partie intégrante du système politique et d’une stratégie de contrôle de la population par l’Etat .
    J’ai vu dans les rues de Paris il y a peu une affiche qui m’a estomaqué :
    « Fier de mon pays , fier d’être bleu »
    J’ai d’abord cru à une affiche du FN mais il aurait fallu bleu blanc rouge , bien que l’UMP se dise « bleue » …comme ça m’intriguait , j’ai mieux regardé et à la fin j’ai compris que le type de l’affiche était un footballeur professionnel sans doute connu et qu’il arborait le maillot d’une équipe , le PSG je crois .
    Et là la fonction socio-politique du foot s’éclaire .
    Moi j’ai d’abord décodé le message politique et donc rejeté cette affiche chauvine.
    Mais un fan de foot aura perçu le message politique de façon inconsciente , car validé par le registre foot .

    De ce point de vue là , celui qui a eu l’idée de l’hommage à Chavez a procédé de façon trop transparente !

  2. Euhhh le baseball une « passion cubaine »?… c’est la premiere fois que j’entends un francophone dire ça!!!!… incroyable!!!!… j’habite en France et à chaque fois que je veux parler de baseball on me « crache » (c’est le bon terme) à la figure que le baseball est un sport « américain », « états-unien » et même « capitaliste » !!!!!… donc M. Jean-Pierre, soit vous habitez au Venezuela depuis très longs temps, et vous venez d’oublier de quelle façon vous détestait le baseball avant, soit vous parlez du baseball simplement pour dire qu’il s’agit d’un sport « populaire » et pas le foot…
    J’imagine que si dans un stade de baseball lors d’un hommage à Chavez le public siffle, vous viendrez dire que le baseball est un sport « américain », « états-unien » et même « capitaliste »…

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