Humoristique/Inattendu/Insolite/Musical

Vuvuzela au Venezuela

Vuvuzelas en concert

Concert de vuvuzelas sur la plage de Durban

Un instrument nouveau a fait irruption sur la scène mondiale à l’occasion de la Coupe du monde de football qui se déroule actuellement en Afrique du Sud: la vuvuzela. Cette corne en plastique –une descendante probable de la corne kudu traditionnelle–,  assourdit de son bourdonnement incessant joueurs, arbitres, sélectionneurs et même téléspectateurs. À tel point que les chaînes de télévision ont dû trouver une parade technique pour atténuer cet entêtant bruit de fond. Si le Mondial 2010 doit apporter quelque chose à la culture du foot, ce sera bien la vuvuzela!

Bizarrement, il est courant de la voir écrite erronément vuvuzuela (143.000 résultats sur Google, contre tout de même 6.880.000 résultats pour vuvuzela). La raison ? Une assonance avec Venezuela, sans aucun doute. Et là, je dois intervenir…

Pollution sonore

joueur de vuvuzela en Afrique du Sud

Haut en couleurs!

Cette dérivation n’est pas si idiote, finalement : si la vuvuzela n’avait pas été inventée par les Sud-Africains, elle l’aurait été sans aucun doute par les Vénézuéliens ! Car question de bruit, ici, on s’y connaît. La pollution sonore est omniprésente, jour et nuit, nuit et jour.

Tiens, rien qu’aujourd’hui, mon immeuble a été pollué pendant des heures par des coups de marteau venus d’on ne sait où. Il y a trois jours, c’est l’alarme d’une voiture qui, en pleine nuit, se déclenchait automatiquement toutes les demi-heures! Et je ne parle pas ici de la musique à plein tube dans les transports publics, des batailles pour la domination sonore dans les parcs et sur les plages (chaque groupe rivalisant par la puissance de ses haut-parleurs) ou même dans les rues commerçantes (les commerces faisant de même). Cela tient presque de la philosophie : en effet, pour le Vénézuélien moyen, le bruit c’est la vie, tandis que le silence, c’est déjà, en quelque sorte, l’antichambre de la mort, excusez du peu.

La vuvuzela est donc une véritable aubaine pour un peuple qui se nourrit de bruit comme pas deux. On peut donc s’attendre à ce que la corne en plastique rencontre le plus grand succès dans les stades du Venezuela, tant elle correspond parfaitement à l’idiosyncrasie locale.  Pour l’instant, les fanatiques vénézuéliens s’en tiennent à la trompette en plastique. Mais celle-ci ne fait décidément pas le poids face à la vuvuzela, dont la puissance peut atteindre 127 décibels!

De là à prédire une prochaine commercialisation massive de la vuvuzela dans le pays, il n’y a qu’un pas. Fabriquée en plastique –un matériau bon marché dans un pays pétrolier comme le Venezuela–, la vuvuzela a un rapport prix/bruit absolument imbattable! Il y a donc fort à parier que l’industrie nationale du plastique, déjà passablement prospère, y verra une bonne occasion de diversifier sa production et de s’enrichir à bon compte.

Instrument de culture

Pedro Espi-Sanchis

Pedro Espi-Sanchis

Un autre domaine dans lequel le Venezuela pourrait amplement tirer profit du vuvuzela, c’est la culture. Si les Vénézuéliens ont su faire des maracas, ce petit objet aux sonorités apparemment limitées, un instrument de musique à part entière, il n’y a aucune raison qu’il ne puissent faire de même avec la vuvuzela. Sa fondamentale en si bémol ne peut être un obstacle à la créativité musicale intrinsèque du Vénézuélien.

Les Sud-Africains eux-mêmes ont tracé la voie. Un Vuvuzela Orchestra existe bel et bien, qui parvient à mettre en valeur la pauvre palette sonore de l’instrument. Curieusement, cet orchestre a été mis sur pied par un espagnol, Pedro Espi-Sanchis, spécialiste des musiques traditionnelles sud-africaines, qui considère que la vuvuzela permet de renouer avec les racines musicales du pays. Mais à quoi ressemble donc un concert de vuvuzelas ? Voici :

Le Vuvuzela Orchestra interprète ici, dans une chorégraphie artistique, Shosholoza, chant traditionnel des travailleurs noirs, devenu ensuite un des symboles de la lutte contre l’apartheid, puis hymne sportif, qui a été interprété notamment par Ladysmith Black Mambazo (de loin la meilleure version), Peter Gabriel et Helmut Lotti !

Sur scène, le Vuvuzela Orchestra est nettement plus spontané :

Bon, je l’accorde, c’est un peu sommaire, mais les musiciens vénézuéliens feront mille fois mieux, j’en suis sûr. Je vois (ou plutôt j’entends) très bien les vuvuzelas accompagner les musiques noires de la côte centrale du Venezuela ou du sud du lac de Maracaibo.

Vuvuzela et politique

vuvuzela

Soufflez fort !

Enfin, il y a un troisième domaine où la vuvuzela a un avenir tout tracé au Venezuela : la politique! On imagine sans peine les grands rassemblements politiques, qu’ils soient du gouvernement ou de l’opposition, animés par des dizaines de milliers de trompes en plastique! La totale ! On imagine tout aussi aisément la classe moyenne manifester son mécontentement en troquant la traditionnelle casserole pour la vuvuzela, plus performante. Ainsi, les opposants pourraient jouer de la vuvuzela pendant les interventions de Hugo Chávez à la télévision (là, il leur faudra du souffle! Pour leur faciliter la tâche, il pourront toujours jouer de la vuvuzela virtuelle ou encore brancher en boucle la radio vuvuzula.fm).

Sport, culture, politique : voici donc trois domaines dans lesquels la vuvuzela a toutes ses chances d’être adoptée et bonifiée au Venezuela. Mais si de telles prédictions se vérifient, il n’y aura alors plus de doute : la vuvuzela deviendra bel et bien la vuvuzuela!

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