Historique/Politiquement incorrect

Le Bolívar nouveau est arrivé

Portrait reconstitué de Simon Bolivar en 3D

Le portrait reconstitué de Simón Bolívar en 3D

Je vous le présente en grand format pour que vous en appréciez tous les détails. Si vous le voulez en plus grand encore (pour en faire un poster, peut-être ?), cliquez sur l’image ou allez sur le site officiel qui lui est consacré.

Je vous parle du portrait de Simón Bolívar, le nouveau, celui qui vient d’être réalisé en utilisant les plus récentes technologies. Pour ceux qui ne connaîtraient pas le personnage, lisez sa biographie détaillée. Pour faire court, disons que, né à Caracas en 1783, il fut homme politique et homme de guerre,  libérateur de l’Amérique latine contre le colonisateur espagnol, et visionnaire de l’union latino-américaine. Il mourut en 1830, déchu et malade, abandonné des siens, sans avoir vu se réaliser ses rêves.

Simón Bolívar est un personnage essentiel pour comprendre les développements historiques et politiques du Venezuela. Il n’est pas un président qui ne s’en soit réclamé –à tort ou à raison, pour le meilleur ou pour le pire. Héros national absolu, on le trouve partout : la monnaie nationale porte son nom, toutes les villes et villages arborent une place Bolívar en leur centre, il existe une Université Simón Bolívar… et le premier satellite vénézuélien est évidemment le satellite Simón Bolívar.

À toutes les sauces

Depuis deux siècles, on utilise donc Simón Bolívar à toutes les sauces. L’actuel président, Hugo Chávez, n’a pas échappé à cette constante. Il a même poussé les choses un peu plus loin, faisant de Bolívar son inspirateur direct et son modèle politique par excellence –au risque, mais ce n’est pas nouveau, de tordre au besoin la réalité historique. Le bolivarianisme est ainsi devenu doctrine d’État et de gouvernement, à tel point que le nom officiel du pays est devenu République bolivarienne du Venezuela depuis l’adoption de la nouvelle constitution de 1999.

Dans cette quête éperdue du modèle, il y eut des temps forts. Ainsi,  en juillet 2010, l’exhumation des restes de Simón Bolívar et l’étude qui s’en suivit sur les causes possibles de son décès. Hugo Chávez avait en effet suggéré que le Libertador aurait pu mourir d’empoisonnement –et non de tuberculose, comme le veut la version officielle–, et voulait en avoir le cœur net.

Premiers résultats

Deux ans plus tard, nous parviennent les premiers résultats de cette opération pour le moins déroutante. Un nouveau portrait a été réalisé sur la base des ossements de la dépouille, à l’aide des techniques numériques les plus avancées du moment (voir le Rapport su la reconstruction faciale en 3D du Libertador Simón Bolívar – en espagnol). Et un rapport préliminaire sur les recherches concernant les causes de la mort du Libertador Simón Bolívar (en espagnol) est publié.

Portraits de Simón Bolívar

Portraits de Simón Bolívar

Sur le nouveau portrait, que dire, sinon qu’il n’est pas vraiment différent des portraits que l’on connaissait de Simón Bolívar-le plus souvent des peintures basées sur des témoignages écrits ou oraux? Tout au plus peut-on noter au Libertador des traits moins européens et plus créoles. De quoi faire tiquer certains…

Quant au rapport préliminaire sur les causes de la mort de Simón Bolívar, il écarte la possibilité d’une mort par un agent pathogène tel que Mycobacterium tuberculosis. Les analyses chimiques pratiquées pour la détermination d’arsenic n’ont pas non plus été concluantes, quand bien même les bulletins émis par le médecin traitant du Libertador décrivent des médicaments contenant de l’arsenic. Par contre, l’administration à doses élevées de poudre de cantaride aurait pu provoquer des altérations, qui, jointes à la maladie broncho-pulmonaire chronique dont souffrait Simón Bolívar, aurait été à la source de son décès.

Le culte à Bolívar

El culto a Bolívar, Germán Carrera DamasTout cela n’est finalement qu’un épisode supplémentaire du Culte à Bolívar, un phénomène idéologico-politique qu’a brillamment décrit l’historien Germán Carrera Damas dans un ouvrage initialement publié en 1969 –et qui est toujours de brûlante actualité. Ce n’en est que la version Chávez, qui s’ajoute à toutes celles qui ont précédé. De celles-ci, elle ne diffère, finalement, que par l’utilisation des technologies de pointe maintenant à la disposition des scientifiques.

Résultat : nous avons un « nouveau » Bolívar. Ou, pour dire les choses plus clairement, nous avons une nouvelle utilisation de Bolívar à des fins nationalistes et politiques. Rien de neuf sous le ciel vénézuélien.

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