Le Venezuela a l’un des taux de de déforestation les plus élevés de la planète. Chaque année depuis 1990, il perd 0,6 % de ses forêts : quelque 287 600 hectares de forêt sont irrémédiablement détruits, sans compter la dégradation qu’entraînent l’exploitation forestière, les exploitations minières et l’extraction de pétrole. Entre 1990 et 2005, le Venezuela a officiellement perdu 8,3 pour cent de sa couverture forestière, soit environ 4 313 000 hectares –l’équivalent de la superficie de la Suisse. Le processus a tendance à s’accélérer depuis 2000, révolution bolivarienne aidant. Celle-ci se montre en effet laxiste s’agissant d’occupations de terre par des paysans.
J’ai été témoin des effets navrants de la déforestation au cours d’une randonnée qui m’a mené de Calderas a Masparrito, dans le piémont andin près de Barinas. Au long des cinq heures de marche, ce ne fut que désolation, dévastation, paysage en complet bouleversement. Il s’agissait ici d’une colonisation agricole dans toute sa splendeur, moyennant la pratique de la terre brûlée.
Les forêts ne sont de personne. Il suffit de choisir un espace, de le clôturer, d’en « améliorer l’usage » (à savoir abattre les arbres pour leur substituer une activité productive –patûrage ou culture) pour avoir l’espoir de recevoir, un jour plus ou moins lointain, un droit de propriété. Si une route est projetée (comme c’est le cas entre Calderas et Masparrito), cela ne rend que plus appétissante l’entreprise, car le terrain se mettra à valoir.
Jeter la pierre?
Nombreux sont donc ceux qui tentent leur chance. Ce ne sont pas nécessairement les plus pauvres : il faut disposer d’un certain capital pour clôturer l’espace et payer les ouvriers qui déforesteront.
Mais cette déforestation sauvage est aussi le fruit de l’ignorance. Il ne faudra que quelques années au colon pour s’apercevoir que les terres défrichées ne conviennent pas pour l’élevage et qu’elles s’épuisent rapidement si on les cultive –à moins d’y insuffler des tonnes d’engrais hautement polluants. Entretemps, le mal sera fait : la forêt primitive aura disparu et ne reviendra plus jamais. Laissé en friche, le terrain sera la proie des fougères et d’une basse végétation envahissante.
Faut-il pour autant jeter la pierre sur le paysan défricheur? Il a sa logique : il doit nourrir ses enfants (souvent nombreux) et surtout assurer leur avenir. Laissé à lui-même, il trouve la solution dans la conquête de nouvelles terres. Bien conseillé, il pourrait plutôt accroître la productivité, généralement très faible, de celles qu’il possède déjà.
Du reste, les habitants du Nord, Européens et Américains, sont bien mal placés pour donner des leçons à ceux du Sud. N’ont-ils pas été historiquement, depuis des siècles, les plus grands défricheurs de la planète, à tel point qu’il n’existe pratiquement plus de forêts primitives en Europe et en Amérique du Nord? Maintenant que les problèmes environnementaux sont planétaires, il est bien beau de sonner l’alarme, mais gardons tout de même une perspective historique et une certaine humilité.
En effet, il serait tout de même malvenu d’exiger des paysans du Sud qu’ils résolvent les problèmes du monde. La solution passe plutôt par l’offre aux petits paysans d’alternatives sociales et économiques viables et crédibles qui leur permettent de concevoir un avenir décent pour eux et leur famille, sans devoir passer par la déforestation.
Mais les responsables politiques et économiques auront-ils l’imagination, la capacité et surtout le courage de se lancer dans un tel défi?
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Un document de Greenpeace au sujet de la déforestation en Asie :
– La palme du réchauffement synthèse en français de « Cooking the climate »
– Cooking the climate en anglais (La palme du réchauffement)
La déforestation est la cause de 22% des émissions de CO2 dans le monde, ce qui correspond à 17% des gaz à effet de serre. Le CO2 n’est qu’une partie (76%) des gas à effet de serre (GES). La déforestation produit autant de CO2 que tous les combustibles fossiles utilisés pour la production d’électricité dans le monde, de 17 à 18% des gaz à effet de serre.
Lire : Electricité, nucléaire et CO2
Une des principales causes de déforestation est celle destinée à produire des agrocarburants, au Brésil et en Indonésie en particulier. Comme quoi les agrocarburants produisent en fin de compte plus de pollution qu’ils ne prétendent en éviter.
La solution évidente est d’arrêter la déforestation (n’oublions pas que les forêts absorbent le CO2), de réduire notre consommation d’énergie et d’investir plus et plus vite dans les énergies renouvelables, en budgets de recherche et en finances.