Le Monde Diplomatique –Le Diplo pour les intimes– consacre un dossier au Venezuela dans son numéro d’avril 2013. On sait que ce magazine plutôt austère s’est toujours caractérisé par le sérieux de son information et de sa documentation. Fidèle à un journalisme de fond, il fait plutôt tache d’huile dans le paysage médiatique français et international, de plus en plus accaparé par les nouvelles « en temps réel » et attiré par le frivole.
Le Diplo ne fait pas exception cette fois encore et donne du Venezuela une image que vous ne trouverez nulle part ailleurs. Plusieurs articles bien documentés composent ce dossier spécial intitulé Chávez et l’exception vénézuélienne, qui pose notamment la question à mille euros : maintenant que Chávez est décédé, une victoire de son mouvement lors du scrutin du 14 avril suffira-t-elle à pérenniser sa « révolution » ?
En guise d’ouverture, Renaud Lambert vient nous rappeler opportunément Ce que Chávez a rappelé à la gauche : le président vénézuélien aura amorcé un mouvement qui a transformé l’Amérique latine. En remettant les classes populaires au centre du jeu, il a placé les gauches de marché face à leurs contradictions.
Steve Rendall, dans son article Pour les médias, un homme à abattre, explique pourquoi les médias occidentaux ont donné une vision systématiquement négative de la révolution bolivarienne, présentant Chávez comme un « dictateur » alors qu’il a toujours été élu à la régulière.
Gregory Wilpert propose pour sa part quelques Scénarios pour l’avenir du mouvement bolivarien : alors que les Vénézuéliens éliront leur prochain président le 14 avril, le nouveau paysage politique peine à se dessiner, entre une opposition disparate et le vide que la figure de Chávez laisse au sein de sa faction.
Dans Itinéraire d’un révolutionnaire, Ignacio Ramonet retrace la jeunesse et la formation initiale de Hugo Chávez, né de parents modestes, d’origine métisse, sans perspective d’ascension sociale en dehors de l’armée. Il s’agit d’une sorte d’avant première d’un livre d’entretiens qu’il a eus avec l’ancien président vénézuélien, intitulé Hugo Chávez. Ma première vie (à paraître en espagnol à la rentrée prochaine).
Citations pas piquées des vers
Pour compléter le tableau, ajoutez à cela quelques citations pas piquées des vers (Affreux, sales et méchants), quelques chiffres révélateurs (Au bout du compte) et un témoignage extrêmement parlant de l’écrivain uruguayen Eduardo Galeano sur le Caracas des années 70 (Le dodelinement de l’oiseau noir).
Tous ces articles et documents sont actuellement disponibles en aperçu seulement et il vous faudra acheter Le Monde Diplomatique d’avril pour pouvoir les lire dans leur intégralité (ou vous abonner à l’édition électronique). Ils entreront plus tard dans les archives et seront alors consultables en ligne.
Par contre, ce qui est en accès libre dès maintenant, c’est une sélection d’archives reprenant les articles que le Monde Diplomatique a publiés sur le Venezuela depuis l’accession de Hugo Chávez à la présidence en 1998 jusqu’à son décès en 2013. Une mine d’informations dont on retiendra surtout la partie intitulée « Un laboratoire politique », avec des articles, notamment, sur la réforme agraire et la participation populaire. Car ces thèmes-là, vous auriez bien de la peine à les trouver dans la grande presse, tout occupée qu’elle est à montrer que Hugo Chávez est un « dictateur » et que sa politique économique est un « échec ».
Sur ce plan, Le Monde Diplomatique joue parfaitement son rôle d’empêcheur d’informer en rond.
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P.S. : Et tant que j’y suis sur les (rares) bons articles sur le Venezuela, je vous signale un texte de la sociologue argentine Maristella Svampa publié dans le magazine suisse À l’encontre : Venezuela, le dilemme du populisme plébéien. C’est l’une des meilleures analyses que j’aie lues récemment sur le chavisme et ce que l’on doit déjà appeler le post-chavisme.