Politiquement incorrect

Le livre que Chávez a offert à Obama

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Tout le monde le sait déjà : lors du Sommet des Amériques, à Trinité-et-Tobago, Hugo Chávez a offert un livre à Barack Obama : Las venas abiertas de América Latina [Les veines ouvertes de l’Amérique latine] de l’écrivain et journaliste uruguayen Eduardo Galeano. Ce n’est pas la première fois que le pétulant président vénézuélien joue au conseiller littéraire. En 2007, en pleine Assemblée générale de l’ONU, il avait conseillé ouvertement la lecture d’un ouvrage de Noam Chomsky, Dominer le monde ou sauver la planète ? : L’Amérique en quête d’hégémonie mondiale, lors d’une intervention plutôt remarquée durant laquelle il avait traité Georges Bush de démon.

Une fois de plus, Chávez réalise un beau coup médiatique. Pour lui (qui s’offre une poignée de main « réconciliatrice » avec le président des États-Unis) et pour le livre : en deux jours, celui-ci a été propulsé parmi les meilleures ventes sur Amazon.com, passant de la 54295e place à la 6e ! Sur Amazon.fr, il est actuellement classé en 37e position, pas mal non plus… Un débat s’est même ouvert sur Amazon : Obama aurait-il dû accepter ce livre venant du méchant Chávez?

Les veines ouvertes de l'Amérique latineEt le contenu de l’ouvrage? Tout Latino-américain tant soit peu intellectuel sait qu’il s’agit d’un classique des années 1970, un essai à la tonalité résolument de gauche qui analyse l’histoire de l’Amérique latine à travers le prisme des colonisations dont elle fut victime durant cinq siècles. Amérique latine spoliée, victime de tous les abus de la part de puissances coloniales et néo-coloniales qui ont pillé à tous crins ses ressources naturelles. Dérangeant, le livre a été interdit en Argentine, en Uruguay et au Chili durant la période des dictatures. Son auteur a dû s’exiler de 1973 à 1985.

Toujours actuellement, Las venas abiertas de América latina figure parmi les lectures obligatoires de tout étudiant en sciences humaines qui se respecte et il n’est pas rare de trouver cet ouvrage au kiosque du coin, aux côtés de El Profeta de Khalil Gibran ou de El Alquimista de Paulo Coelho.

Reste à savoir si Barack Obama lira ce cadeau « empoisonné ».

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3 réflexions sur “Le livre que Chávez a offert à Obama

  1. J’espère que le livre de Galeano n’est pas du même alcool frelaté que ceux de Coelho et Gibran 🙂

    Vous aurez compris que je n’ai pas lu ce néo-best-seller. C’est sans doute parce que je n’ai pas étudié les sciences humaines…

    « […] l’Amérique latine à travers le prisme des colonisations dont elle fut victime durant cinq siècles. » Sauf votre respect, Jean-Luc, ne trouvez pas cette phrase un peu étrange ? Ou, pour le dire autrement, que serait l’Amérique latine si elle n’avait pas été colonisée ? À mon humble avis, sans aucun doute dans un état bien pire encore que celui dans lequel elle se trouve aujourd’hui.

    • Francis, je te rassure, le livre d’Eduardo Galeano est d’une autre eau (d’un autre alcool…) que ceux de Coelho et Gibran. Admirablement écrit, par ailleurs, comme tous les textes de Galeano.

      Quant à faire de l’histoire-fiction et imaginer ce que serait devenue l’Amérique du Sud (non latine, donc) sans les colonisations, je laisse ce beau scénario à Hollywood!

  2. J’allais justement faire un petit topo à la mords-moi-le colon sur ce livre puissant… Tant mieux!
    Galeano a fait un travail encyclopédique inouï, sans cesse réactualisé en plus.
    Sa fascination à certains égards pour Castro est le seul point qui me fait chier dans l’essai, un peu vieilli mais pas tant que ça au final…
    abrazo les tontons!!

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